« L’Age de diamant » – Neal STEPHENSON

XXIe siècle. Le monde est divisé en communautés idéologiques, 516uKVZooQL._SX210_dont une des plus importantes est celle des Néo-Victoriens qui entendent s’inspirer de la culture de l’Angleterre du XIXe siècle. Au sein de cette communauté, dans la cosmopolite Shanghai, le puissant et excentrique industriel Finkle-McGraw est déçu par le conformisme du système éducatif et demande à l’ingénieur John Hackworth de créer un manuel d’éducation interactif destiné à sa petite-fille. Mais le manuel est volé et atterrit entre les mains de la petite Nell, fillette des bas-fonds maltraitée par les compagnons successifs de sa mère. Grâce à la nanotechnologie contenue dans le manuel, celui-ci se lie à la fillette et la met en scène dans des contes interactifs où la Princesse Nell doit faire face à diverses situations qui sont autant d’occasions d’apprendre et de grandir vers un destin exceptionnel.

L’Age de diamant est, en partie, un Bildungsroman, c’est-à-dire un roman d’apprentissage ou d’éducation. Le titre exact du roman est d’ailleurs L’Age de diamant ou Le Manuel illustré d’éducation pour jeunes filles. Il est donc centré sur l’évolution de Nell qui va progressivement réussir à s’extirper du milieu défavorisé dans lequel elle est née. Cet aspect du roman est une franche réussite. Les contes de fée qui poussent Nell à surmonter les obstacles et qui lui apprennent au passage la grammaire, la conjugaison, l’éloquence, les mathématiques, la programmation, les sciences, les usages sociaux, et les arts martiaux, entre autres, sont écrits de façon très subtile et exploitent pleinement les possibilités offertes par ce monde où la nanotechnologie et la réalité virtuelle sont extrêmement développées. L’Age de diamant est en effet un des romans emblématiques du sous-genre postcyberpunk, où les développements technologiques sont aussi importants que dans le cyberpunk, mais dans un univers moins noir et moins pessimiste, où les personnages tentent d’améliorer leur situation sociale.

Malheureusement, le roman souffre de nombreux défauts.

Tout d’abord, l’histoire de Nell se croise avec celle de John Hackworth, nettement moins intéressante et totalement dispensable. On imagine bien que l’auteur a voulu mettre en parallèle l’ascension de Nell et la lente descente aux enfers de l’ingénieur. Le problème est que le personnage de Hackworth est tout sauf attachant, qu’on ne tarde pas à se désintéresser totalement de ce qui lui arrive, et qu’on ne comprend d’ailleurs pas très bien les événements qu’il traverse (et qu’il subit avec beaucoup de passivité).

D’une manière plus générale, il est très difficile de s’attacher aux nombreux personnages qui évoluent dans cet univers aux côtés de Nell, tant ils sont abandonnés à leur sort par l’auteur. Certains sont très vite assassinés, d’autres disparaissent régulièrement au fil de l’histoire, sans qu’on sache jamais ce qu’il advient d’eux, où ils sont ni pourquoi ils ont subitement disparu. Et même l’épilogue de la trame narrative principale qui concerne Nell et Hackworth laisse franchement sceptique.

Le style de l’auteur contribue également au massacre des personnages car il est très centré sur les descriptions : vêtements, bâtiments, gadgets nanotechs, infrastructure urbaine, armes, repas, véhicules… Il semblerait bien que ça soit ici l’univers dans lequel les personnages évoluent qui importe, et non les personnages eux-mêmes. Cela implique donc que le rythme est très lent et qu’il ne se passe pas grand chose. Et comme les quelques personnages qui pourraient susciter un regain d’intérêt sont systématiquement écartés sans raison apparente, on finit par s’ennuyer ferme.

Prix Hugo du meilleur roman en 1996, L’Age de diamant est un roman complexe et original, mais aussi (et surtout) très lent. Les nombreux clins d’oeil à la littérature de l’époque victorienne (entête de chapitres sous forme de résumés, références diverses à Dickens ou à Alice au Pays des Merveilles, jeunes filles maniérées en crinoline qui apprennent à servir le thé, …) ne font pas oublier les personnages insipides ni les intrigues secondaires sans intérêt et jamais résolues.

2 star Neal Stephenson : L’Age de diamant – 1995.

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